Dés que le ballon toucha terre, le garçon en question, que je pensais être Nate, avait tourné les talons, ramassé le ballon venu à ses pieds... moi, je levais ma main vers ma bouche comme pour empêcher à un exclamation - peut être vulgaire - de s'échapper. Lui, encore inconscient de mon identité, s'approchait de moi pour me redonner la balle...
Je reconnus alors encore mieux ses traits, ce visage d'ange et ses cheveux noirs toujours aussi soignés... Il avait néanmoins changé, il avait grandi, prit ses formes d'hommes et avait une cicatrice, faible cicatrice, pas très voyante, à l'arcade... Mais il était le même, celui que je connaissais, celui qui s'en est allé, celui qui m'a laissé. Il était toujours Nate... du point de vue extérieur... Avait-il changé, intérieurement ?
Apparemment, lui aussi venait de découvrir que j'étais là, devant lui, comme il y a quatre années. Si je n'étais pas paralysée, je serais partie en courant, sans ne rien lui dire, même si l'envie de le descendre par des paroles m'avait démangé. Mais non, j'étais bien là, consciente, devant lui, mais incapable de bouger. C'était Nate, bel et bien devant moi. Que faisait il ici, comme par hasard ? Que lui était il arrivé ? Il devait bien s'être passé quelque chose pour qu'il atterrisse ici...
Mais pour le moment, je m'en fiche. Je n'ai pas à me soucier de lui. Suis-je dure ? Oui, surement, mais il est parti d'Albuquerke, il m'a abandonnée, un mois avant que ma mère ne mourut. Je me suis retrouvée seule pour la pleurer, sans pouvoir retrouver ses bras pour me réconforter... Je réussis à recouvrir un peu de ma capacité à bouger, et ma main s'enleva de devant ma bouche. Je le regardais, et il me regardait aussi. Comme si chacun avions vu un fantôme, l'un et l'autre étant l'humain et le fantôme à ma fois.
Je repense à ce soir d'anniversaire, de mes six ans, où il m'avait offert un bracelet, bracelet valant bien trop cher mais signifiant que notre amitié serait éternelle et que jamais on ne s'abandonnerait. Promesse brisée... il ne l'a pas tenue, malheureusement, et c'est de là que notre amitié s'est terminée. Mais ce bracelet, bizarrement, je le porte toujours à mon poignet gauche. Il n'a pas bougé depuis quatre ans. Pourquoi ? Peut être parce que j'espérais qu'un jour Nate refasse surface ?
Mais aujourd'hui, je ne veux pas de lui, je refuse de pardonner, et qu'il me le demande, je dirais, non. Il n'a pas le droit de s'offrir mon pardon après quatre années sans nouvelles. Ca m'a fait trop de mal, j'ai tellement souffert de son absence, et il aurait du revenir plus tôt. Même si ce n'est pas de sa faute si il est ici... Mais croyez vous, que si il ne serait pas ici aujourd'hui, serait-il venu me retrouver à Albuquerke dans quelques années ? M'aurait-il enfin fait part de ses nouvelles ? De toute façon, il y a bien longtemps que c'est trop tard pour lui d'obtenir le bénéfice du doute de ma part... Je ne dis pas que je ne le pardonnerais jamais... ou peut être, mais je ne suis pas prête. Non, je n'ai pas oublié la souffrance que j'ai enduré ces quatre dernières années, et pour les effacer, il faudra faire gros.
C'est déstabilisée et en manque de bonnes paroles que je prononçais les premières paroles venues à l'esprit...

▬ Mais... qu'est ce que tu fous ici...

Phrase bien agressive, soudaine et impolie, mais reflétant mes sentiments présents...